Pourquoi détenir des obligations alors que les CPG rapportent plus de 5%?
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La vitesse à laquelle les taux d’intérêt ont monté en a pris plusieurs par surprise. De près de zéro en 2020, le taux directeur des banques centrales est passé à plus de 5% aujourd’hui. Cette hausse a un impact sur l’ensemble des autres taux d’intérêt – de votre compte d’épargne à votre hypothèque en passant par les obligations émises par les gouvernements et les entreprises.
Une telle hausse est une bien mauvaise nouvelle pour les emprunteurs – incluant les ménages qui doivent renouveler leur hypothèque à un taux de près de 7% et les gouvernements qui voient le service de la dette littéralement exploser.
Les nouvelles sont meilleures pour les épargnants, qui peuvent maintenant obtenir un taux de 5,30% sur un certificat de placement garanti (CPG) bancaire. C’est plus élevé que le taux d’inflation courant, ce qu’on n’avait pas vu depuis belle lurette. En fait, le taux sur les CPG échéant dans un an est supérieur au rendement à échéance sur un portefeuille diversifié d’obligations canadiennes qui est d’environ 4,95%.
Alors, on achète des CPG plutôt que des obligations?
Même s’ils sont tous les 2 des titres à revenu fixe – c’est-à-dire qu’ils versent un montant d’intérêt fixe jusqu’à leur échéance – on ne peut substituer les CPG aux obligations dans un portefeuille. Ce serait comme embaucher un électricien alors qu’on a besoin d’un plombier!
Pour bien comprendre le rôle que peuvent jouer les CPG et les obligations dans un plan financier, on doit d’abord rappeler leurs caractéristiques respectives.
Comme son nom l’indique, un CPG bancaire est un placement garanti par la banque qui l’émet. Quand on achète un CPG, on prête de l’argent à la banque pour un terme fixe (généralement de 1 à 5 ans), à un taux fixe. Les CPG ne sont pas encaissables avant leur échéance1. À l’échéance, on reçoit l’intérêt couru et on retrouve notre capital. En outre, les CPG sont couverts par la Société d’assurance-dépôts du Canada (SADC).
Les CPG sont un excellent outil lorsque l’horizon de placement est court (moins de 3 ou 5 ans) et que la protection du capital est primordiale. Vous prévoyez acheter une voiture l’an prochain ou faire une mise de fonds sur une maison dans 2-3 ans? Le CPG est le produit tout désigné pour vous.
Si l’horizon de placement est plus long, et à fortiori lorsqu’on épargne pour la retraite, on doit plutôt favoriser les obligations. Voyons pourquoi.
Les obligations constituent aussi une forme de prêt de l’investisseur à l’émetteur. Les gouvernements (fédéral et provinciaux) et les compagnies (incluant les grandes banques canadiennes) émettent des obligations pour financer leurs activités. Les obligations sont émises pour des échéances variant de 1 an à plus de 30 ans. Comme pour le CPG, l’émetteur de l’obligation verse à son détenteur un intérêt fixe (le coupon, généralement payé semestriellement) et le capital est remboursé à l’échéance. Contrairement aux CPG cependant, les obligations sont négociables, c’est-à-dire qu’on peut les vendre en tout temps pour accéder à son argent. Elles sont donc « liquides ». Elles ne sont pas couvertes par la SADC.
Leur échéance plus longue et leur liquidité confèrent aux obligations des avantages que les CPG n’ont pas.
Comme les CPG, elles stabilisent la valeur du portefeuille puisque leur rendement est généralement peu corrélé avec celui des actions. En plus cependant, les obligations offrent une protection contre les ralentissements économiques et les crises – qui sont généralement accompagnés d’une baisse du cours des actions et des taux d’intérêt – puisque leur valeur augmente lorsque les taux d’intérêt baissent.
Par exemple, s’il y a une récession en 2024 et que le rendement à l’échéance des obligations 10 ans redescend de son niveau actuel d’environ 5% à 3%, la valeur du portefeuille obligataire pourrait augmenter jusqu’à 13%, en plus des versements d’intérêt. Le CPG n’offre pas une telle protection parce qu’il n’est pas encaissable et que son échéance est trop courte2. Si les taux baissent, ils ne prennent pas de valeur et on doit simplement le renouveler au nouveau taux de 3%.
C’est d’ailleurs ce qu’on a observé lors de la crise financière de 2008. De mai 2008 à mars 2009, un portefeuille diversifié d’actions a perdu près de 45 % de sa valeur, alors qu’un portefeuille investi 60% en actions et 40% en obligations n’a baissé « que » de 26%. Bien entendu, les 2 portefeuilles ont recouvert leur valeur. Le portefeuille 100% actions a historiquement généré 2% de plus annuellement que le 60-40, mais peu de gens peuvent tolérer une baisse de 45% de la valeur de leur portefeuille sans réagir. Beaucoup d’entre euxprennent la pire des décisions et vendent leurs actions dans le creux de la vague. Conséquemment, ils réalisent un rendement inférieur à celui du 60-40 – sans parler de toutes les nuits blanches…
Le tableau plus bas donne un sommaire des caractéristiques des CPG et des obligations. Chacun a un rôle à jouer dans la gestion de vos finances. Le CPG sert à gérer les liquidités dont on prévoit avoir besoin à courte échéance. L'obligation sert plutôt à équilibrer le portefeuille de placement afin de protéger le capital contre les baisses de marchés.
Dans le doute, parlez à votre conseiller!
[1] On peut acheter un CPG encaissable en tout temps à un taux d’environ 3%.
[2] On peut acheter un CPG avec une échéance jusqu’à 5 ans si on accepte de n’avoir aucun accès au capital jusqu’à échéance.
[3] Certaines obligations sont émises avec des échéances plus longues, voire des obligations perpétuelles.
[4] CPG échéance 1 an Banque de Montréal; obligation échéance 5 ans Banque de Montréal; en date du 25 octobre 2023.